La République Dominicaine en musique
Bachata et merengue, ces deux styles incarnent à merveille l’art de vivre et de faire la fête de ce pays, où la musique coule dans les veines de tous les habitants. Dans les soirées d’hôtels, les lieux publics ou lors de festivals, ces rythmes dominicains vous emportent jusqu’au bout de la nuit…
Les fans de rythmes latino-tropicaux s’en rappellent encore. C’était en 2002, le groupe de bachata new-yorkais Aventura sortait Obsesión, un tube qui allait devenir durant l’été 2003 n° 1 des tops single en France et en Suisse, mais aussi en Autriche, en Flandre, en Allemagne et en Italie. Un « carton » venu fort à propos pour faire connaître en Europe cette danse lascive dominicaine, exigeant une souplesse de bassin peu commune.
A l’époque, les voyageurs habitués de la destination n’avaient pas été surpris. Eux savaient déjà qu’en « Rep Dom », la danse, et la bachata en particulier, était omniprésente. Une constance sous les tropiques, direz-vous. Certes, mais avec cette spécificité locale qui rend les soirées dominicaines uniques, comme elles peuvent l’être en Jamaïque avec l’exclusivité du reggae.
Sons du continent noir et de la vieille Europe
Mais au fait, qu’est-ce que la bachata ? Comme souvent dans les Caraïbes, en Amérique centrale et du Sud, territoires colonisés par les Européens et soumis à l’esclavage d’Africains, ce style est l’héritage combiné de sons du continent noir et de la vieille Europe, en l’occurrence, ici… du boléro rythmique. Le genre a vraiment éclos dans les années 1960 mais est resté longtemps cantonné aux couches populaires. Il faut attendre le boom touristique des années 1980, avec l’éclosion des resorts dans la région de Punta Cana pour que ce style se diffuse sur les plages et gagne le cœur (et les oreilles !) du grand public.
Cette danse latine de couple a connu depuis différentes écoles d’interprétation (styles « sensual », « urbain », « moderne »…) mais sa technique de base reste la même : une série de pas d’avant en arrière sur un rythme à huit temps, avec le déhanché du bassin sensuel qui va avec. Lorsque l’on prend des cours de bachata, le professeur a l’habitude de prononcer un « Hop » aux quatrième et huitième temps, moments où l’on doit réorienter ses pieds. On dit ça pour ceux qui auraient envie de se lancer dans l’apprentissage…
Bachata, l’amour universel et ses tourments…
La bachata se danse sur une musique nécessairement latino. Il n’y pas à proprement parler de « musique bachata », même si le genre peut se reconnaitre à sa mélodie mêlant la lenteur du boléro, le rythme du cha-cha-cha et la rengaine du mambo. Depuis les années 1990, la bachata a intégré des sons contemporains et « mondiaux » qui lui permettent d’être entendue par tous.
Les paroles, elles, chantent l’amour universel et ses tourments, la mélancolie, la tristesse, l’infidélité, le romantisme, la passion… Même empreinte de félicité, elle n’est pas considérée comme une danse de séduction comme le tango, mais de partage humoristique sur les vicissitudes de l’amour, chaque partenaire n’étant pas dupe des lâchetés qu’il induit… Il arrive enfin que des danseurs exécutent la bachata en groupes de couples. On appelle cela la rueda de bachata, un spectacle collectif spectaculaire à voir notamment lors des festivals. Depuis 2019, la bachata est inscrite sur la liste du patrimoine culturel immatériel de l’humanité par l’UNESCO.
Danse à deux temps, elle est accompagnée par trois instruments particuliers : le güiro, un cylindre métallique troué hérité des Taïnos, Indiens dominicains décimés par les Espagnols après leur arrivée sur l’île ; le tambora, une percussion originaire d’Afrique ; et l’accordéon, venu tout droit d’Espagne lors de la colonisation. Dans les années 1970, d’autres instruments ont fait leur apparition, accompagnant un vent de modernisation de ce genre musical : trombone, saxophone, piano… Quant aux paroles des chansons, elles délaissent un peu le répertoire de l’amour et de la séduction pour se concentrer sur les aléas de la vie quotidienne.
Shakira et son tube Loca
En matière d’artistes de merengue, il faut parler des interprètes locaux traditionnels, comme Juan Luis Guerra, auteur, compositeur, interprète et maître du genre, Wilfrido Vargas ou Johnny Ventura. Ce dernier, ancien député-maire de Saint-Domingue, a eu droit à trois jours de deuil national après son décès en 2021 ! D’autres artistes ont permis de faire connaître ce style hors des frontières caribéennes. Ainsi d’Elvis Crespo, chanteur de merengue… portoricain dont le titre Suavemente, en 1998, a voyagé dans le monde entier. Plus récemment, en 2004, le titre Enamorame de Papi Sanchez a connu le succès, en mixant merengue et rap. Enfin, n’oublions pas Shakira et son tube Loca, synthèse de pop latino et de merengue.
Derrière ces deux styles phares de la musique dominicaine, d’autres sont également populaires dans le pays. C’est le cas du jazz, de la musique électronique et du denbow, une sorte de dancehall local. N’oublions pas aussi le « son », un genre né au nord de l’île à la fin du 19ème s., alliance de rythmes africains et latins, ni les musiques folkloriques. L’une d’elles, interprétée par la Fraternité du Saint-Esprit des congos de Villa Mella (un quartier nord de Saint-Domingue) est ainsi inscrite depuis 2008 sur la liste représentative du patrimoine immatériel de l’humanité.
Carnavals et concerts
C’est l’occasion de parler des chances de croiser ces musiques lors d’un séjour en République dominicaine, à Punta Cana, Bayahibe, La Romana ou ailleurs. S’agissant de la Fraternité ci-dessus, elle célèbre sa fête à la Pentecôte, à Villa Mella, avec force danses, chants et processions. Mais c’est surtout le carnaval de février qui transcende toutes ces musiques. Chaque dimanche du mois, des parades aux mille couleurs investissent le pavé, à Saint-Domingue, Barahona, Santiago, Puerto Plata et surtout à La Vega, le plus ancien et le plus populaire carnaval. Points d’orgues de ces agapes : le 27 février, jour de la Fête de l’Indépendance et le premier dimanche de mars, à Santo Domingo, avec la parade du carnaval national sur le boulevard du Malecón.
Hors les concerts et soirées musicales proposés dans les hôtels-clubs du pays tout au long de l’année, il reste un lieu où il faut se rendre absolument : les ruines du monastère de San Francisco, dans la capitale Santo Domingo. Chaque dimanche en fin d’après-midi, le célèbre Grupo Bonyé s’y produit gratuitement devant une foule de danseurs locaux, aux rythmes sensuels et entrainants de la bachata et du merengue. Cultissime !
Dernière mise à jour : 20/12/2024
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